Blédard
Argot, connotation péjorative pour quelqu’un qui vient d’arriver dans le pays.
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uitspraak
Blédard
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voorbeeld
Oui, hier j'ai rencontré un blédard. C'est pour dire que j'ai rencontré quelqu'un qui vient d'arriver en Belgique, et qui est en difficulté, qui parle pas bien français, qui parle arabe. Voilà.
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voorbeeld
Blédard, c'est un mot purement inventé par les jeunes, j'crois. On le retrouve pas encore dans les dictionnaires, ou... à priori, je ne sais pas....
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voorbeeld
Fatima a parlé du mot racisme et moi dans mes mots, j'avais choisi deux mots qui se ressemblent un petit peu, c'est blédard et smeks.
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uitleg
Blédard est aussi un mot péjoratif, encore fort utilisé par les jeunes d'origine maghrébine. Et on parle de blédard, pour parler de quelqu'un qui vient du pays, qui vient d'arriver en Belgique et qui est dans des difficultés, financière ou autres, mais c'est vraiment plus parce qu'il vient du pays. Mais...voilà.
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uitleg
Quand j'entends un jeune qui dit, ça c'est un blédard, et donc un blédard c'est quelqu'un qui vient du bled et donc c'est souvent les primo-arrivants, alors je l'interpelle et je dis, toi, tu l'appelles blédard, ton papa il vient d'où ? Ton père il vient d'où ? Ah, il vient du Maroc. Alors, c'est aussi un blédard. Ah non, c'est mon père. Je lui fais la moral parce que je dis, tu ne peux pas le traiter de blédard. Bled c'est la campagne aussi, c'est un petit peu comme campagnard. Je suis vraiment triste d'entendre ça au niveau des 3 e et 4e générations, ces jeunes qui utilisent ce mot sans se rendre compte que c'est un mot qui fait mal, qui est blessant.
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anders
"Il est arrivé avant-hier. Avant hier ?
Là.
Il a traversé des pays qui parlent des langues qu’il n’a pas compris. Lui, il a continué à parler sa langue, celle de sa mère, celle de son père et celle de ceux d’avant eux.
Ici, pour demander de l’eau ou un lit, il a appris un geste, un morceau de mot, un truc vite fait, utile, pratique. Il est arrivé. Évidemment, il y a toujours une période d’adaptation. Ici. Mais là, ça va très vite pour lui. Il voit bien que s’il ne rencontre personne de sa source, de son eau, il s’asséchera, il vrillera. Il traverse des rues, en écoutant les gens qui traversent avec lui, ou qui sont arrêtés au feu rouge. Il entend bien s’il reconnaît des sons, parfois, il croit et puis pas. Souvent, les gens sont fermés ou ils sont dans leur vie, aucune parole n’émerge, ne filtre, ne jaillit.
Il a bien pensé leur demander son chemin, mais vu qu’il ne sait pas où il va…
Deux jours déjà. Deux jours ?
Il a débuté une sorte de journal, sur du papier journal. Il place ici et là les mots qu’il connaît au milieu de ceux qu’il ne connaît pas. Ça lui fait une trace. Il pense que s’il ne trouve pas rapidement quelqu’un qui le comprend, qu’il comprend, il perdra l’usage de sa voix.
Ce n’est pas tant le silence qui l’angoisse mais l’absence. L’absence. L’absence de sa gorge, l’absence de sa trachée, l’absence de son ventre, l’absence de ses entrailles. Où est sa voix ?
Alors, il répète les chansons enfantines, une ou deux ritournelles avec des trous dedans, il chuchote des nouvelles de la télé qu’il a retenues, et des bribes des paroles des sages qu’on lui a offert quand il a dit qu’il partait, de là-bas. Ça fait une litanie, une forme de prière qu’il nourrit de toutes les voix différentes. Ces voix qui l’occupent, qui le coupent. Il parle à voix haute, il s’entend, ça lui fait de la compagnie. Pourvu que bientôt quelqu’un parle comme lui, avec lui. Pourvu qu’à un moment, il ne croit pas qu’il est le seul ; qu’il est le seul, qu’il est le seul et qu’en plus, il est le seul fou."
Milady Renoir – janvier 2012 - Mise en onde de Daniel Martin-Borret